Coût de l’enseignement privé en France

L’enseignement privé en France coûte beaucoup d’argent… public … à l’inverse de la plupart des pays étrangers où l’enseignement privé est financé la plupart du temps par les « clients ».

La Cour des Comptes a fait les comptes en 2022:

L’enseignement privé sous contrat est financé pour 73% par des fonds publics. Pourtant, les contrôles financiers, pédagogiques et administratifs sont quasi inexistants déplore la cour des comptes dans un rapport publié jeudi 2 juin. Tout aussi grave, en concentrant un nombre élevé d’élèves de milieux favorisés, l’enseignement privé risque d’aggraver « certaines faiblesses du système éducatif » pointent les sages de la rue de Cambon qui appellent à moduler les moyens en fonction du profil social des élèves. Ce rapport est « intemporel » et n’a pas de lien avec la signature récente du protocole mixité entre Pap Ndiaye et le secrétaire général de l’enseignement privé”. Le président de la cour des comptes se défend de vouloir porter une parole politique, pour autant, il enjoint les collectivités à prendre en charge les frais de restauration et de transport scolaire pour permettre le « libre choix » des familles les moins favorisées. 

En 2022, l’enseignement privé sous contrat en France a accueilli plus de 2 millions d’élèves, représentant 17,6 % de la population scolaire, répartis dans environ 7 500 établissements. Ce système a été instauré par la loi Debré du 31 décembre 1959, qui permet à des écoles et établissements privés de s’associer au service public d’éducation en signant un contrat avec l’État. Ce contrat implique des engagements tels que le respect des programmes éducatifs nationaux et une politique non discriminatoire en matière d’admission des élèves.

Contrairement aux établissements publics, qui sont tenus d’accepter tous les élèves de leur zone géographique, les établissements privés peuvent sélectionner leurs élèves, souvent en fonction de leur « caractère propre ». Ce dernier, bien qu’il ne soit pas clairement défini par la législation, se manifeste généralement par des spécificités confessionnelles ou pédagogiques. À noter que 96% des établissements privés sous contrat sont catholiques, tandis que les 4% restants appartiennent à d’autres réseaux confessionnels, y compris juifs et musulmans, qui ont vu une augmentation de leurs effectifs ces dernières années.

Coût de l’enseignement privé ?

Le financement de l’enseignement privé sous contrat s’est élevé à 8 milliards d’euros en 2022. Ce budget couvre à la fois les salaires des enseignants et le forfait d’externat pour les établissements du second degré, destiné à financer les charges liées au personnel de vie scolaire.

L’État finance 55% des coûts pour les écoles privées, contre 74,3% pour les écoles publiques.

Pour les collèges et lycées, la part du financement étatique est de 55,2% dans le privé et de 58,6% dans le public.

La différence est principalement comblée par les contributions des familles dans le secteur privé et par les collectivités locales dans le secteur public. Une règle informelle établit un ratio de 20% pour la répartition des effectifs entre le privé (20%) et le public (80%).

L’enseignement privé sous contrat en France montre une résistance notable face à la baisse démographique affectant les écoles françaises. Selon Pierre Moscovici, le secteur privé perd moins d’élèves que le public, avec une différence particulièrement marquée dans le second degré. Il note également que l’enseignement privé refuse annuellement entre 30 000 et 40 000 élèves, et que sans la règle des 20%, sa croissance serait encore plus significative.

Diversité sociale dans le privé ?

Cependant, la composition démographique des élèves dans le privé a évolué au fil des ans. Au cours des deux dernières décennies, la diversité sociale au sein de ces établissements a diminué. En 2021, 40,2 % des élèves de l’enseignement privé sous contrat provenaient de milieux très favorisés, contre 26,4 % en 2000. De plus, les élèves issus de milieux favorisés ou très favorisés représentent désormais une majorité (55,4 %) dans ce secteur, alors qu’ils ne constituent que 32,3 % des élèves dans le public. Concernant les élèves boursiers, leur présence est nettement plus faible dans le privé (11,8 %) par rapport au public (29,1 % en 2021). Cette situation de ségrégation a été soulignée par les révélations des IPS en novembre dernier.

Face à cette réalité, le président de la rue de Cambon a exprimé des préoccupations quant à l’efficacité des mesures actuelles pour promouvoir la mixité sociale dans l’enseignement privé. Il a écarté l’idée de quotas comme solution, soulignant que les établissements privés, ayant la liberté de sélectionner leurs élèves, pourraient finir par choisir uniquement les meilleurs élèves boursiers. Pour améliorer la situation, la cour des comptes recommande l’implantation de davantage de dispositifs Segpa et Ulis dans les établissements privés. L’objectif est de garantir une mixité sociale accompagnée d’une mixité scolaire, en veillant à ce que les établissements accueillent des élèves aux profils variés. Cette démarche vise à éviter de limiter l’accueil aux seuls bons élèves issus de milieux défavorisés, ce qui pourrait aggraver les problèmes de l’enseignement public sans démontrer une réelle efficacité éducative et pédagogique de l’enseignement privé.

Problème des cantines

Le président de la Cour des Comptes, malgré sa réticence initiale à s’engager dans le débat, a souligné un problème majeur concernant l’enseignement privé : l’absence de prise en charge des frais de cantine et de transport scolaire par les collectivités locales, surtout dans un contexte d’inflation, accentue les inégalités. Ces coûts représentent un obstacle insurmontable pour les familles les moins aisées. Selon lui, cette situation contribue à la concentration d’élèves issus de milieux plus favorisés dans l’enseignement privé, imputant ainsi une part de responsabilité aux collectivités locales dans la ségrégation scolaire, un point qui ne manquera pas de susciter des réactions.

Enseignement privé dans des quartiers défavorisés

La cour des comptes s’est également exprimée sur l’établissement des écoles privées dans les quartiers défavorisés. Elle met en garde contre le risque que ces établissements attirent les élèves les plus à même de réussir, en raison de leur milieu social ou de l’engagement de leurs parents, au détriment des établissements publics locaux. Cette dynamique pourrait entraîner un départ massif d’élèves prometteurs de leurs écoles publiques d’origine vers de nouveaux établissements privés, exacerbant ainsi les problèmes de ségrégation scolaire.

Résultats scolaires du privé

Dans l’ensemble, les établissements d’enseignement privés affichent de meilleurs résultats aux examens que ceux du secteur public. Cependant, les experts de la rue de Cambon mettent en garde contre des conclusions hâtives sur la performance globale de ces établissements. Ils soulèvent la question de savoir si ces résultats supérieurs sont le fruit de l’efficacité organisationnelle et pédagogique de ces établissements ou s’ils découlent simplement de la sélection des élèves les plus performants, qui sont naturellement plus faciles à mener vers la réussite aux examens.

Pour véritablement évaluer la performance des établissements sous contrat, il faudrait qu’ils prennent en charge une part significative des difficultés scolaires, en plus des difficultés sociales. Les établissements privés, qui jouissent de la liberté d’inscription des élèves, pourraient ainsi accueillir une plus grande diversité d’élèves. Cela impliquerait pour certains établissements d’adopter une politique moins élitiste. Cette démarche permettrait une évaluation plus juste de leur performance réelle, au-delà des simples résultats aux examens.

Pas de contrôle de l’Etat sur l’utilisation de l’argent public

Bien que les établissements d’enseignement privé bénéficient de financements publics en vertu de leur contrat avec l’État, Pierre Moscovici souligne un manque de contrôle financier adéquat sur ces établissements. Des réglementations existent pour encadrer ces contrôles, mais, selon la cour des comptes, elles ne sont ni suffisamment connues ni appliquées. Il est rare que les établissements soumettent leurs comptes aux directeurs départementaux ou régionaux des finances publiques dans les délais requis. De plus, certains directeurs régionaux des finances publiques ont admis ne pas effectuer ces contrôles.

Lors d’inspections dans six académies, il a été constaté que parfois les services académiques ne disposaient même pas des contrats initiaux ou de leurs avenants, se contentant au mieux de copies. La cour des comptes insiste sur la nécessité de corriger cette absence de base réglementaire, essentielle pour le paiement du forfait d’externat, et juge inacceptable le non-respect des textes réglementaires.

Concernant le contrôle pédagogique, également prévu par la réglementation, la cour le considère comme minimaliste. Dans toutes les académies visitées, ce contrôle se limite aux inspections des maîtres contractuels lors des trois « rendez-vous de carrière », sans une vérification globale du projet éducatif de l’établissement en lien avec les priorités éducatives nationales.

Enfin, pour ce qui est du contrôle administratif, la situation n’est guère plus reluisante. Ni l’Inspection Générale de l’Éducation, du Sport et de la Recherche (IGÉSR) ni les rectorats n’ont de programme systématique pour le contrôle administratif des établissements privés sous contrat. Ce contrôle n’est effectué que de manière ponctuelle, en réponse à des problèmes signalés. Sans un contrôle administratif et financier adéquat, il est impossible de garantir que les fonds publics sont utilisés correctement dans ces établissements.

Voici le rapport de la Cour des Comptes

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